Sur un dépliant annonçant la parution prochaine de l’édition française de Onze Kunst [^1], revue dirigée par Paul Buschmann – promoteur de l’art flamand et hollandais –, Picasso réalise dans les marges blanches latérales des petits dessins évoquant l’Égypte ancienne : un paysage de pyramides encadré, à gauche, et un homme de profil au pagne assez hiératique tenant une fleur de lotus dans la main, à droite. De petits motifs de végétaux gribouillés dans la marge intérieure font écho aux entrelacs ornementaux de style Art nouveau de la revue. Alors que ces dessins sont jetés sur le papier, le singe, au bas de la page, est quant à lui traité différemment et paraît répondre à l’en-tête de la revue dans une symétrie « secrète[^2] ». L’attention portée aux détails est remarquable : le singe a une branche dans une main, fume une pipe et porte un petit chapeau qui n’est pas sans rappeler les petits animaux des cirques ambulants qui parcourent villes et campagnes au début du siècle dernier.

[^1]: Revue néerlandophone illustrée, Onze Kunst (1902-1929) connaît une version française, éditée avec Victor-Harvard & Cie, intitulée L’Art flamand et hollandais. Le dépliant que Picasso utilise annonce la parution de cette version française dès 1903 mais le premier numéro ne sortira qu’en janvier 1904. Interrompue pendant la Première Guerre mondiale, la revue paraît de nouveau en 1921 sous le titre Revue d’art jusqu’en 1929.

[^2]: Picasso Working on Paper, Anne Baldassari (dir.), Dublin, Irish Museum of Modern Art, 29 mars-28 mai 2000, Londres et New York, Merrell Publishers et Dublin, Irish Museum of Modern Art, 2000.