Le 9 novembre 1918, Guillaume Apollinaire meurt touché par l'épidémie de grippe espagnole. En mai 1921 se met en place un comité chargé du financement d'un monument à Apollinaire. En hommage à son ami poète disparu, Picasso réalise plusieurs projets sous forme de maquettes destinées à recevoir une traduction monumentale. Après avoir essuyé un premier refus, ces projets seront soumis à un deuxième comité, constitué en 1928. En étroite collaboration avec Julio Gonzalez, dont il utilisa l'atelier de la rue de Médéah à Paris, l'artiste crée durant l'automne 1928 au moins quatre projets de sculpture en fil de fer. Le Musée national Picasso - Paris possède trois de ces maquettes. En décembre 1932, Brassaï, photographiant alors les sculptures de l'atelier de la rue de la Boétie, les décrit en ces termes : « je photographiai plusieurs sculptures en fil de fer […] : constructions linéaires, géométriques dans un espace à trois dimensions – triangulaires pour la plupart. Elles formaient en quelque sorte la réplique plastique de sa série de l'Atelier de 1927-1928, les corps réduits aux purs schèmes. » (Brassaï, Conversations avec Picasso, Paris : Gallimard, 1964, p. 25 sq). Ensembles de lignes droites, coudées ou arrondies, réalisés en fil de fer soudés en des points particuliers, les sculptures ne relèvent pas d'une construction purement abstraite. Dans ces structures tridimensionnelles, symétriques par rapport à un plan axial, s'intègre la représentation d'une figure humaine, contenue par les lignes de force matérialisées de l'espace. D'une série d'études graphiques, où dans une constellation de points reliés entre eux, la figure dialogue avec l'espace, est née une série de sculptures dans lesquelles s'incarne l'idée d'un dessin dans l'espace. Dans ces sculptures du vide et de la transparence, Picasso semble répondre au souhait de l'Oiseau du Bénin, double de l'artiste dans la nouvelle d'Apollinaire, Le poète assassiné : « il faut que je lui sculpte une profonde statue en rien, comme la poésie et la gloire ».

Ce projet sera refusé par la Société des Amis de Guillaume Apollinaire. En 1959, une Tête de femme (Dora Maar), bronze de 1941, a été installée en hommage à Apollinaire dans le jardin de l'église Saint-Germain-des-Prés. La maquette (MP265) a été agrandie en 1984 pour le jardin du Musée Picasso.