Quatre courriers inédits de Fernande Olivier et Pablo Picasso à Guillaume Apollinaire rejoignent le Centre d’études Picasso

Résumé :
Le Musée national Picasso-Paris a récemment enrichi ses fonds d’archives grâce au don de quatre pièces inédites adressées par Pablo Picasso et sa compagne Fernande Olivier à Guillaume Apollinaire. Ce don a été généreusement accordé par Paloma Ruiz-Picasso, attachée à la transmission de l’héritage artistique de l’artiste.
Lettre et enveloppe - Courrier écrit par Pablo Picasso à Guillaume Apollinaire
Crédits
© Musée national Picasso-Paris

Acquises lors d’une vente aux enchères organisée par la maison Magnin Wedry, ces archives sont un témoignage intime des relations d’amitié nouées entre Picasso et Apollinaire. Inédites, ces lettres n’ont pas été publiées dans l’ouvrage de référence dirigé par Pierre Caizergues et Hélène Seckel sur la correspondance échangée entre les deux amis (Paris, Gallimard, 1992). Ces documents viennent par ailleurs compléter les fonds déjà conservés par le musée, en particulier la correspondance adressée par Apollinaire à Picasso faisant partie du fonds d’archives personnelles de l’artiste (515AP). Le musée conserve également deux importants ensembles de lettres expédiées par l’artiste espagnol à son ami : le fonds Bernard Poissonnier, donné en 1989 par le marchand, proche de la veuve d’Apollinaire, et le fonds Gilbert Boudar, acheté par le musée en 1990 au neveu de Jacqueline Apollinaire.

Le don de la famille se compose d’une carte postale et de trois lettres, qui nous plongent au cœur du contexte artistique et historique du début du XX siècle. La carte postale, datée du 17 mai 1907, est signée par Fernande Olivier, compagne de l’artiste. S’adressant à Apollinaire, elle le prie de lui restituer un ouvrage consacré aux « sports du Japon » que lui avait prêté le collectionneur américain Leo Stein, avec lequel Picasso et elle vont dîner. Le recto de la carte postale, représentant la rue Ravignan de Montmartre, est orné d’un dessin à la plume montrant Apollinaire avec chapeau et parapluie.

Les trois autres courriers ont été écrits dans les années 1910. Une missive du 25 août 1911 a été envoyée à Apollinaire par Picasso lors d’un de ses séjours à Céret. L’artiste évoque le vol de la Joconde au Louvre, affaire qui fit grand bruit et impliqua malgré eux les deux amis. Il mentionne notamment le controversé « baron de Ormesan » comme « voleur de la Gioconde (sic) » : il s’agit de Géry Pieret, secrétaire occasionnel d’Apollinaire qui avait soustrait au Louvre des statues ibériques et qui avait inspiré au poète le personnage du baron d’Ormesan dans son recueil de nouvelles L’Hérésiarque et Cie (Paris, Stock, 1910). Picasso ajoute qu’il serait très heureux d’illustrer un ouvrage de son ami et qu’il a beaucoup apprécié sa nouvelle publiée dans le journal Le Matin (il s’agit de « L’Œil bleu », parue dans le quotidien du 31 juillet 1911).

Suit un court et bouleversant message envoyé depuis Barcelone le 5 mai 1913, dans lequel Picasso annonce la triste nouvelle du décès de son père. La dernière pièce est une lettre du 20 octobre 1916. Picasso invite Apollinaire – alors en convalescence à l’hôpital Italien situé quai d’Orsay à la suite d’une grave blessure subie à la tête pendant la guerre – à venir déjeuner dans sa maison à Montrouge, tout en ajoutant qu’il a lu son dernier livre (Le Poète assassiné, Paris, Bibliothèque des Curieux, 1916) ; pour guider son ami, l’artiste reporte en dessin un plan du quartier depuis la Porte d’Orléans où apparait, comme un clin d’œil aux lieux qu’ils aimaient fréquenter ensemble, « la rue dans laquelle on trouve des Bricque à Brac » (sic).