Picasso et le théâtre

Premières influences

Picasso assiste très jeune aux spectacles de rue qui colorent la cité malaguène. En compagnie de son père, José Ruiz Blasco, il arpente les quartiers gitans et garde le souvenir ardent des démonstrations de flamenco  ; il assiste aussi à ses premières corridas, dont il retient les bruits, les odeurs et les couleurs de ce « spectacle total ». 

 

A Barcelone, Picasso se familiarise avec les arts de la scène tandis qu’il fréquente les cafés concerts et le cabaret artistique du Quatre Gats  dont il apprécie plus particulièrement les spectacles de marionnettes et d’ombres chinoises. 

La scène Parisienne

Ses premiers séjours à Paris lui valent quelques commandes d’illustrations et projets d’affiche pour le théâtre et les music-halls, tandis que son amitié avec Max Jacob puis Guillaume Apollinaire, et sa fréquentation en leur compagnie du cirque Medrano  confirment son intérêt pour les figures marginales de représentation - clowns, danseuses, saltimbanques et acrobates , avec une compassion particulière pour la figure d’Arlequin à laquelle il s’identifie. 

 

Le Lapin Agile,  cabaret artistique tenu par le père Frédé, est dans ces mêmes années le lieu d’accueil des poètes, des musiciens et des artistes de la bohème montmartroise dont les soirées sont de grandes messes théâtrales organisées autour de déclamations de poèmes, d’interludes musicaux et de discours enflammés sur la création. 

Les ballets russes

Ce goût pour la scène performative et populaire prend un nouvel essor pendant la guerre lorsque Picasso rejoint la troupe des Ballets Russes  en 1917 à Rome afin de travailler auprès de Serge de Diaghilev, Jean Cocteau et Léonide Massine  aux décors et costumes du ballet Parade, dont la musique originale est composée par Erik Satie.

 

La complicité de Picasso avec les danseurs de la compagnie et ses escapades napolitaines  lui font découvrir les représentations de la Commedia dell’arte où il retrouve le personnage tragi-comique de Polichinelle. C’est aussi à Naples qu’il fait l’acquisition de masques et de marionnettes et commence à réfléchir avec Massine et Igor Stravinsky  – compositeur avec lequel il tisse une amitié durable - au ballet Pulcinella que la compagnie présentera en 1920 au Théâtre national de l’Opéra à Paris. Son histoire d’amour avec la danseuse russe Olga Khokhlova  et ses diverses collaborations pour les ballets jusqu’en 1924 justifient sa fréquentation des salles de concert et des soirées artistiques qui fleurissent dans le Paris des années folles. 

Costumes, masques et marionnettes

Plusieurs photographies témoignent du jeu avec lequel Picasso et Olga se déguisent à l’occasion de ces bals costumés tandis que le jeune Paul, né en 1921, est représenté en majesté, en tenue d’Arlequin et de Pierrot , sous le pinceau de son père. Un goût pour le travestissement que l’on retrouve après-guerre dans les clichés de la Californie où Picasso se déguise sous l’œil amusé de ses invités et des photographes tandis que musiciens, matadors, arlequins et clowns ennoblis par leurs costumes et accessoires de scène dominent le corpus de peintures des dernières années  et s’affichent comme autant de représentations symboliques de l’artiste.