Le* Jeune Garçon à la cruche* fait partie des premiers monotypes réalisés par Picasso, qui s’intéresse en 1906 à ce procédé de peinture sur verre ou sur métal permettant d’obtenir un tirage unique par pression du support peint sur une feuille. L’oeuvre est représentative de l’épure vers laquelle tend Picasso au cours de cet été-là : l’anecdote et le superflu disparaissent, ni paysage ni éléments de contexte ne viennent situer cette figure intemporelle au dessin très simple. La composition est minimaliste : un bloc géométrique constitue l’assise sur laquelle repose le jeune garçon et confère une forme de stabilité à l’ensemble, le nu assis n’est qu’ébauché – le bras et le pied droits sont invisibles. L’artiste s’intéresse plus au rapport entre les différents éléments de cette composition qu’à leur définition propre. L’usage discret de la couleur souligne l’espace pictural dévolu à chacun. Seule la nudité du jeune garçon et la cruche rouge[^1] au premier plan ancrent la scène dans une antiquité réinventée par l’artiste à Gósol[^2]. La sérénité classique de la composition et son sujet évoquent les Deux Adolescents (1906, NGA, 1963.10.197), peint la même année, dans laquelle on retrouve le motif du jeune garçon nu, assis sur un même volume architectural indéfini, ainsi qu’une cruche similaire à celle-ci, à l’arrière-plan.

[^1]: Identifiée par Brigitte Baer et Bernhard Geiser comme une « poterie de Gosol » ; voir Baer, 1986-1996, vol. 1, p. 398.

[^2]: Voir à ce propos Picasso and Greece, Kyriakos Koutsomallis et Jean Clair (dir.), Andros, musée d’Art contemporain, 27 juin-26 septembre 2004, Turin, Umberto Allemandi & Co, 2004.