Pendant l’hiver 1902-1903, Picasso dessine plusieurs charités et familles de pêcheurs en écho au maître français Puvis de Chavannes dont il a découvert l’oeuvre peint en 1900 – par exemple Le Pauvre Pêcheur (1881, Orsay, RF506), probablement vu lors de son premier voyage à Paris au musée du Luxembourg –, puis les fresques du cycle de La Vie de sainte Geneviève au Panthéon pendant son troisième séjour parisien. Quelques tableaux consacrent l’ensemble (La Tragédie (Les Pauvres au bord de la mer)). Le dessin présente ici une scène de récolte – moisson ou pêche – ainsi que l’indiquent le geste du personnage au second plan et l’action de collecte qui engage les deux du centre, lorsqu’un homme s’éloigne vers la gauche avec un baluchon sur le dos. Tout à droite, figure une maternité, autre sujet récurrent chez le Picasso des jeunes années lorsqu’au loin, trois lignes esquissent l’horizon marqué par la double courbe d’une montagne et l’horizontale d’un plan d’eau. En un minimum de traits, l’artiste condense avec équilibre l’essentiel d’une scène de genre située tout à la fois dans le sillage des représentations symbolistes de l’âge d’or et des scènes réalistes où hommes et femmes de labeur sont liés au même destin misérable.